Etiquette, cérémonial : Folklore ou cadre structurant ?
l’aïkido se pratique dans un dojo.
Pourquoi utiliser ce terme japonais au lieu de l’équivalent anglo-français de "club" ?
l’aïkido que nous pratiquons est un art traditionnel. Il ne peut se confondre avec un sport, ni dans l’esprit, ni dans son fonctionnement. Le "club", tel que nous le connaissons en Europe, est très bien adapté à l’enseignement et à la pratique des sports, pas à une discipline orientale. Nous aurons sans doute l’occasion de nous étendre sur cette question dans ces pages tout au long de l’année. Commençons par aborder un aspect dont l’appréhension est parfois difficile pour les plus débutants : le cérémonial.
Lorsqu’on monte pour la première fois sur un tatami, il est bien légitime de se sentir désorienté, tant la pratique paraît codifiée de bout en bout ! Rassurez-vous, les plus anciens, qu’on appelle les sempaï, ont pour mission de vous accompagner, de vous guider : ils sont tous passés par là. Quoi qu’il en soit, la première des facultés à aiguiser pour apprendre l’aïkido est l’observation. Reproduisez, copiez, répétez, et demandez toutes les explications utiles à la fin de la séance...
Un document sur le cérémonial vous est remis lors de l’inscription : il décrit avec précision le mode de vie au dojo. Il est surtout fonctionnel, c’est-à-dire qu’il est conçu pour faciliter l’apprentissage. Son assimilation, cependant, est un peu complexe. Arrêtons-nous un instant sur les aspects principaux :
l’aïkido est une discipline traditionnelle. Bien que les accidents y soient extrêmement rares (nous veillons à travailler en permanence dans le respect de l’intégrité physique et du bien-être de tous), toutes les techniques, martiales, sont dangereuses par définition (l’adjectif "martial" d’rive directement du nom de Mars, le dieu romain de la guerre, des techniques de combat, des armes). L’attention de tous les pratiquants doit être dirigée en permanence vers la pratique, et vers la pratique seulement. On limite donc, pour cette raison, tout ce qui pourrait gêner la concentration du groupe. On évite ainsi au maximum de parler pendant le travail à même pour corriger un geste technique -, on adopte une tenue adaptée (les ongles sont coupés, on ne porte pas de bijoux, en particulier de boucles d’oreilles, de bracelets, de collier : outre le risque de casse, bien réel, on s’expose à des blessures importantes, on ne mâche surtout pas de chewing-gum, qui au moindre coup peut venir obstruer la trachée).
Le système des saluts :
Les saluts sont au coeur du cérémonial. Loin d’être une marque de soumission, ils favorisent à leur manière le bon déroulement des apprentissages. Si l’on s’incline, C’est d’abord pour garder à l’esprit que l’on ne vient jamais pour se mesurer aux autres, pour signifier son humilité et son respect à dans une discipline martiale, cela ne va pas de soi puisqu’on vient d’une manière ou d’une autre pour apprendre à se battre : le salut interdit en quelque sorte l’esprit bagarreur ! Une règle simple est à appliquer en permanence : tout salut doit être fait en conscience, on ne salue jamais sans penser à ce que l’on fait, sans penser à la personne que l’on salue, sans penser à la posture penchée que l’on adopte, qui favorise évidemment le déséquilibre mais qui doit rester forte et souple. Les saluts, qui sont très fréquents, doivent à chaque fois nous rattacher au sens du cours.
Le premier salut : il s’exécute en entrant dans la salle où l’on pratique, C’est le salut au dojo.
En montant sur le tapis et lorsqu’on le quitte, on salue en direction du tokonoma, C’est-à-dire le portrait du fondateur. Loin de renvoyer à un quelconque culte de la personnalité, cela symbolise la transmission : les élèves, le professeur, tous montrent leur respect au principe de l’apprentissage.
En début et en fin de séance, les pratiquants saluent à nouveau, tous ensemble, le tokonoma, puis se saluent mutuellement.
A la fin de chaque démonstration par l’enseignant, les élèves saluent ensemble (autant l’enseignant lui-même que la technique qui vient d’être montrée).
En début et en fin de chaque séquence de travail, les pratiquants se saluent (salut à genoux en début de cours et à la fin, salut debout le reste du temps).
Lorsque l’enseignant a fini une démonstration qui leur est destinée, les élèves le saluent avant de reprendre leur pratique.
On apprend vite : tous ces aspects, C’est leur fonction première, favorisent d’abord la concentration et ramènent l’esprit, qui a tendance à batifoler bien légitimement en fin de journée, sur le tatami !
Jacques Bazin